Réglementation du bilan de gaz à effet de serre (BEGES)

En France, la lutte contre le changement climatique passe aussi par la transparence des organisations sur leurs émissions. C’est dans ce cadre qu’a été instauré le Bilan d’Émissions de Gaz à Effet de Serre (BEGES), un outil réglementaire devenu incontournable pour les entreprises, les établissements publics et les collectivités.

Le BEGES est une photographie des émissions générées par une organisation. Il recense l’ensemble des gaz à effet de serre produits directement ou indirectement par ses activités : consommation d’énergie, déplacements, processus de production, achats ou encore gestion des déchets. Réalisé selon une méthodologie standardisée, il permet non seulement de mesurer mais aussi de mieux comprendre l’impact climatique d’une structure.

Origines et cadre législatif

Initialement porté par l’article 75 de la loi Grenelle II, promulguée le 12 juillet 2010 et faisant suite à la loi Grenelle I du 3 août 2009, le dispositif avait pour but de décliner de manière concrète les engagements environnementaux de la France. Aujourd’hui, c’est l’article L.229-25 du Code de l’environnement qui précise le cadre législatif et réglementaire du Bilan Carbone®. Ce texte constitue la base juridique encadrant la réalisation des BEGES et leur rôle dans la stratégie nationale de transition écologique.

Qui est concerné ?

Depuis la loi Grenelle II, certaines organisations ont l’obligation de réaliser un BEGES. Sont concernées les entreprises privées de plus de 500 salariés (ou 250 salariés en Outre-mer), les établissements publics de plus de 250 agents, ainsi que les collectivités territoriales de plus de 50 000 habitants. L’obligation ne se limite plus à publier un bilan : depuis 2023, il est également nécessaire d’y associer un plan de transition, afin de présenter les actions concrètes envisagées pour réduire les émissions.

Périmètre d’application

La réglementation impose de couvrir a minima le scope 1 (émissions directes, liées aux installations et véhicules contrôlés par l’organisation) et le scope 2 (émissions indirectes liées à l’énergie achetée : électricité, chaleur, vapeur).
Le scope 3 (autres émissions indirectes : achats, transport, déplacements, usage et fin de vie des produits) reste pour l’instant optionnel dans le cadre réglementaire français, mais il est de plus en plus attendu. De nombreuses organisations choisissent de l’intégrer volontairement afin d’avoir une vision complète de leur empreinte carbone et d’anticiper les obligations européennes à venir (CSRD).

Y a-t-il des spécificités sectorielles ?

La méthodologie réglementaire est la même pour tous, mais certains secteurs sont particulièrement concernés par l’enjeu carbone en raison de leur poids dans les émissions nationales. L’industrie lourde, l’énergie, le transport et le bâtiment font partie des secteurs où les attentes en matière de transparence et de trajectoires de réduction sont les plus fortes. Certaines filières disposent également de méthodologies sectorielles spécifiques ou d’outils complémentaires, permettant d’aller plus loin que les obligations minimales.

Fréquence et obligations de publication

La fréquence de réalisation varie selon les acteurs : tous les 4 ans pour les entreprises et tous les 3 ans pour les établissements publics et les collectivités. Les résultats doivent ensuite être transmis à l’ADEME et publiés sur la plateforme nationale dédiée, afin de garantir transparence et comparabilité.

Une réglementation en évolution

La réglementation évolue régulièrement pour être plus exigeante. Elle pousse désormais les organisations à élargir leur analyse au scope 3, s’aligne sur la future directive européenne CSRD, et s’inspire des standards internationaux comme le GHG Protocol ou la SBTi.

Plus qu’une contrainte, une opportunité

Bien plus qu’une obligation réglementaire, le BEGES représente un véritable levier stratégique pour les organisations. En mesurant leurs émissions, elles identifient leurs principaux postes d’impacts et peuvent hiérarchiser les actions à mettre en place pour réduire leur empreinte carbone : efficacité énergétique, évolution des modes de production, mobilité durable, achats responsables ou encore optimisation logistique. Cet outil favorise ainsi une démarche structurée et priorisée, qui dépasse le simple exercice administratif.

Surtout, le BEGES s’inscrit pleinement dans le cadre des Accords de Paris, qui visent à limiter le réchauffement climatique à +1,5 °C par rapport à l’ère préindustrielle. Pour y parvenir, chaque organisation doit définir une trajectoire de réduction de ses émissions alignée avec les objectifs nationaux et internationaux. Le BEGES constitue alors la première étape incontournable : il fournit la base de référence indispensable pour construire une stratégie climat robuste, établir des objectifs intermédiaires (à court, moyen et long terme) et piloter les progrès dans le temps.

En anticipant les risques liés au changement climatique (hausse des coûts de l’énergie, évolution réglementaire, attentes des clients et investisseurs, vulnérabilité des chaînes d’approvisionnement), les entreprises et les collectivités renforcent leur résilience économique et sociale. À l’inverse, ignorer cette dynamique reviendrait à s’exposer à des contraintes accrues et à une perte de compétitivité dans un monde en transition.